Elysian Fields
Life on earth exists within a thin, delicate envelope barely thirty kilometers thick: the biosphere. Through “Elysian Fields“, I explore the intermediate layer which separates the terrestrial world from that of the cosmos. This space is in suspension and like the world below, it is not quiet.
The sky, in the foundational myths of our ancestral societies, was perceived as a realm inhabited by spiritual entities, integrated into a network of relationships. Much like forests or rivers, it played a central role in daily life and rituals, becoming the stage for mythological narratives.
However, the arrogance of modernity has sought to dominate the nature. This sacred conception has been replaced by a scientific and desacralized vision of the cosmos. There seems to be no room left for mystery.
Today, the sky is also physically degraded by pollution and human intervention. Yet, it is these floating rivers that nourish the Earth, bringing water, air, and light—the fundamental elements of life.
For several years, I have been photographing the sky from my airplane seat. Once airborne, between 9 000 and 12 000 meters, the confined space reduces my territory and mobility. The small porthole, coupled with the window of the camera viewfinder, becomes my escape from acrophobia, this irrational fear of heights, or rather, of falling and emptiness.
In the air, suspended in these seemingly lifeless margins, there is no physical wandering. The plane moves from one place to another, along to a very precise trajectory. It is the landscape that comes to us. From this vertical axis and looking horizontally (we never see the Earth's surface), nature reveals a variety of shapes, colors, shadows and light. I began this project as a topography of fluctuating surfaces and spaces eventually allowing myself to be immersed in impermanence and the perception of transcendence. The Poetics of Space (G. Bachelard).
The magic, mystery and power of a photograph stem from its inherent incompleteness and the limits of representation. Confronted with “in-finity” and its perpetual transformation there is a tension between the memory of a landscape and the “Equivalent”. In other words, the emotion evoked by abstraction.
Impalpable constructions absorb, overlap, tear or intertwine in forms that seem to reflect my imagination. There is no structure except for the horizon and the frame of my viewfinder. These visions emerge as troubling resurgences of the unsettling landscapes of the sublime.
The true journey lies in these endless loops between the real and the imaginary, between the landscape and abstraction, between inner intimacy and outer immensity. This precarious state of appearances and absolute impermanence evokes both the fragility of our existence and that of our societies, resonating with profound political instability.
The sky reflects the duality between the cosmic world and the terrestrial world. Like two sides of the same coin, light and darkness, good and evil, fascination and destruction cannot be separated.
To photograph is also to capture disappearance, time and light - an image that has already ceased to exist and will never return. I perceive a certain order and proceed by elimination, determining the frame and the moment when the unit constitutes a totality sufficient in itself. “Simplicity is resolved complexity” (Brancusi)
In Elysian Fields, there is no ending, only the possibility of new beginnings. Perhaps the sky is the last refuge of our dreams and fears.
La vie sur terre est localisée à l’intérieur d’une fine et délicate enveloppe d’à peine une trentaine de kilomètres d’épaisseur : la biosphère. À travers ce projet “Elysian Fields“, j’explore la couche intermédiaire qui sépare le monde terrestre de celui du cosmos. Cet espace est tout en suspension et comme le monde d’en bas, il n’est pas tranquille.
Le ciel, dans les mythes fondateurs de nos sociétés d’origine était perçu comme un espace habité par des entités spirituelles. Intégré dans un réseau de relations. À l’instar des forêts ou des rivières, il a joué un rôle central dans la vie quotidienne et les rituels, devenant ainsi le théâtre de récits mythologiques.
Cependant, la suffisance de la modernité a cherché à dominer la nature. Cette conception du sacré a été remplacée par une vision scientifique et désacralisée du cosmos. Il semble ne plus y avoir d’espace pour le mystère.
Le ciel aujourd’hui est aussi un ciel physiquement dégradé par la pollution et l’intervention humaine. Pourtant, ce sont ces rivières flottantes qui nourrissent la Terre, apportant eau, air et lumière, les éléments fondamentaux de la vie.
Depuis plusieurs années, je photographie le ciel depuis mon siège d’avion. Une fois dans les airs, entre 9 000, 12 0000 mètres d’altitude, l’espace confiné réduit mon territoire et ma mobilité. Le petit hublot, doublé de la fenêtre du viseur de mon appareil photo, me sert d'échappatoire à mon acrophobie, cette peur irrationnelle de la hauteur, ou disons plutôt du vide et de la chute.
Dans les airs, suspendus dans ces marges sans vie apparente, il n’y a pas d’errance physique. L’avion se déplace d’un endroit à un autre selon une trajectoire très précise. C’est le paysage qui vient à nous. Depuis cet axe vertical et regardant à l’horizontal (on ne voit jamais la surface terrestre), la nature laisse coexister toute une variété de formes, de couleurs, d’ombres et de lumières. J’ai commencé ce projet comme une topographie de surfaces et d’espaces fluctuants avant de me laisser immerger dans l’impermanence et la perception de la transcendance. “La Poétique des Espaces“(G. Bachelard)
La magie, le mystère et la puissance d’une photographie découlent de son caractère d’incomplétude, des limites de la représentation.
Face à « l’in-fini » et sa perpétuelle transformation se crée une tension entre la réminiscence d’un paysage et « l’Equivalent » (Stiglitz). En d’autres termes, l’émotion de l’abstraction.
Des constructions impalpables s’absorbent, se chevauchent, se déchirent ou s’entrelacent dans des formes propices à l’imagination. Il n’existe de structure que l’horizon ou le cadre de mon objectif. Ces visions apparaissent comme des résurgences troublantes des paysages inquiétants du sublime.
Le véritable voyage se trouve dans ces boucles incessantes entre le réel et l’imaginaire, le paysage et l’abstraction, entre l’intimité intérieure et l’immensité extérieure. Cet état de précarité des apparences et d’impermanence absolue, évoque tout autant la fragilité de nos existences que celle de nos sociétés et résonne avec la profonde instabilité politique.
Le ciel reflète la dualité entre un monde cosmique et le monde terrestre. Telles les deux faces d’une même pièce, on ne peut séparer la lumière et les ténèbres, le bien et le mal, la fascination et la destruction.
Photographier, c’est retenir la disparition, le temps et la lumière ; une image qui a déjà cessé d’exister et ne reviendra plus jamais. Je perçois un certain ordre et procède par élimination, décide d’un cadre et de l’instant où l’unité constitue une totalité suffisante à elle-même. « La simplicité, c’est la complexité résolue » (Brancusi)
Dans Elysian Fields, il n’y a pas de fin, seulement la possibilité de nouveaux commencements. Peut-être le ciel est-il le dernier refuge de nos rêves, comme de nos angoisses.
Exhibition PIP
Pingyao - China
09-2023